Un lâchage ? Une prise de distance, assurément. Interrogé, dimanche 20 mai, sur RTL, à propos de l'avenir judiciaire de Jacques Chirac lorsque prendra fin, le 16 juin, son immunité présidentielle, Alain Juppé, numéro deux du gouvernement, a répondu, sans émotion particulière vis-à-vis de son ancien mentor : "Il a un statut quand il est président de la République, quand il n'est plus président de la République il est un citoyen comme les autres. Je pense que c'est l'application des textes, de la loi." Et la loi, M. Juppé en connaît la rigueur. Condamné en décembre 2004 à quatorze mois de prison avec sursis et un an d'inéligibilité pour "prise illégale d'intérêt" dans une affaire concernant la rémunération frauduleuse de cadres du RPR par la ville de Paris lorsque M. Chirac en était le maire, il estime avoir payé plus que sa part.
A une question sur une éventuelle réforme des délais de prescription qui permettrait de clore des enquêtes dans lesquelles l'ancien président a été cité, il a rétorqué : "La question ne manque pas de sel. Vous pensez que je pourrais répondre oui..." "Donc vous répondez non ?" a relancé son interlocuteur. "Evidemment", a répondu M. Juppé.
Ancien adjoint aux finances de M. Chirac à la Mairie de Paris, M. Juppé a été auditionné, mardi 15 mai, par la police financière dans le cadre d'une enquête portant sur des emplois présumés fictifs au cabinet du maire, dans les années 1980 et 1990. Egalement interrogé par les journalistes sur cette audition, il en a profité pour se décrire modestement en "citoyen à la disposition de la justice". "On m'a demandé de venir pour être entendu comme témoin, et à ce que je sais, lorsqu'on entend quelqu'un comme témoin, c'est parce qu'a priori il n'y a pas de charges contre lui. Donc j'ai fait mon devoir et j'y suis allé". Un exemple que, de toute évidence, il souhaiterait voir suivi.
Philippe Ridet
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